Eric Budry signe aujourd’hui dans La Tribune de Genève un éditorial visiblement favorable au projet de loi auquel nous avions fait référence à plusieurs reprises (voir les articles Eclaircie parlementaire dans les droits politiques des étrangers, Dégager l’horizon démocratique – publié dans le Courrier et Sortir du tunnel – publié dans le Temps). Ayant franchi le cap de la commission responsable en fin d’automne, le projet vient en effet, rapports de commission publiés, d’être mis à l’ordre du jour de la prochaine plénière du Grand Conseil, programmée pour les 27 et 28 février, donc dans tout juste deux semaines.
C’est évidemment avec grand plaisir que nous saluons une telle réaction dans le quotidien payant le plus lu des genevois. On peut espérer qu’elle préjuge favorablement de l’issue du vote des députés, souhaitée la plus large possible.
L’éditorialiste n’a pas hésité à juger sévèrement la situation héritée de la votation de 2005, qu’il qualifie d’apéritif ayant laissé les partisans d’une démocratie accessible aux résident.es. étranger.ère.s sur leur soif. Il plaide énergiquement pour l’aggiornamento leur conférant des droits politiques cantonaux, et faut-il évidemment ajouter, communaux, complets. C’est la visée première du projet de loi en question, au-delà même du périmètre électoral des premiers concernés, laissé inchangé pour en rester au niveau du droit de participer sans y mêler d’entrée les considérations d’effectif de ceux à qui il s’applique.
A ce propos, notre association ne fait pas mystère que les conditions mises aujourd’hui à cette participation sont trouvées trop restrictives, à l’opposé des appétits de ceux qui rêvent de les durcir encore pour accepter l’éligibilité ou le passage à la sphère cantonale. Anticiper sur de futures batailles pour une prise en compte plus réaliste des durées d’adaptation au système politique en vigueur que les huit années actuelles, abaisser le seuil de la majorité civile pour écouter la jeunesse entreprenante et soucieuse de l’avenir de la planète, aurait été mettre la charrue avant les bœufs. C’est pourquoi nous ne partageons pas la perspective que des droits complets au niveau cantonal consisteraient en une position maximale, que certains tiennent pour déraisonnable. Il ne faut pas opposer la naturalisation, d’obédience fédérale, tributaire de la notion identitaire de parcours préalable d’intégration, à l’apprentissage progressif par la pratique plusieurs fois l’an de la démocratie directe dans son canton. Cette conception, qui forme l’armature des opposants du MCG et de l’UDC, relève au contraire d’une variante du tout ou rien fleurant bon l’intégrisme. Faciliter la naturalisation et l’intégration est une nécessité complémentaire, facultative et volontaire, qui ne contredit en rien la démarche promue par le projet de loi, basée sur l’automaticité dérivant de la seule résidence, pour peu qu’elle corresponde à une volonté de s’inscrire durablement dans le territoire.
L’éditorial est accompagné d’un article de fond du même auteur, qui commente succinctement les divers arguments des participants aux auditions, dont votre serviteur, qu’il cite notamment à propos de sa contestation de l’applicabilité de la notion de réciprocité à un sujet qui ne relève pas en Suisse de la compétence fédérale, mais de l’autonomie cantonale.
Enfin, le journaliste y pointe aussi qu’il était temps que Genève cesse de jouer les lanternes rouges en Romandie, et continue selon sa formule de pratiquer la “retirette” dans ce dossier, au lieu de se conformer à sa position en pointe dans le pourcentage de résidents sans passeport à la croix blanche. L’infographie qui suit vient corroborer éloquemment ce jugement.
Nous tiendrons nos lecteurs prochainement au courant des développements attendus du projet de loi, qui devraient intervenir avant les municipales du 15 mars. Nos sincères remerciements à Eric Budry pour avoir pris les devants et sensibilisé l’opinion, mieux que nous aurions jamais pu songer à le faire, à cet événement charnière de la démocratie à la genevoise.